De ma fenêtre

De ma fenêtre
Toulouse, 5 juillet 2014, 21h15

jeudi 4 juin 2015

La nuit 88


Au cœur de la nuit, les arbres agitent leurs doigts
pour attraper les sauvages pensées, lianes du sens,
les nuages se délitent dans la noirceur d'un puits,
lever les yeux au ciel revient à tomber de si haut,
lancer les bras, les mains tentent d'agripper l'air,
les cyprès ne s'embarrassent pas de tant de vanité,
au bout des branches fragiles gouttent, sève acide,
les espoirs fourbus, mot légué par Nicolas Bouvier,
dans les bourgeons naïfs étouffent les siècles vides,
passants, pantins, démarche saccadée, talons secs,
genoux et chevilles rouillés, chapeaux vissés, jupes,
la porcelaine des rires éclate sur le trottoir, la joie,
sol jonché de saisons inachevées, d'enfances à venir,
d'actes d'amour esquissés, une jambe, doux regard,
la peau frémit sous la caresse des yeux, ce frisson,
un merle éberlué, se rêvant aigle, s'ébroue, muet,
il survole les cimes, au loin l'océan, les poissons,
silence des ouïes, l'argent scintille dans les remous,
cela suffit à faire basculer les murs de la chambre,
les immeubles se cachent derrière les cyprès bleus,
le temps trouve refuge dans les boîtes aux lettres,
j'imagine le fleuve sous la lune, secret, chantant,
qu'a-t-il donc à fêter ainsi je ne sais quel succès,
il retient la lumière, s'en nourrit, apaisé, heureux,
mais oui, les oiseaux se contemplent dans l'eau,
une voiture au loin klaxonne, une, deux, trois fois,
lance un appel si doux, comment résister à ton rire,
c'est impossible, tu le sais, autant renoncer à vivre.

(4 juin 2015)
Toulouse, 27 février 2015, 16h33. ©JJMarimbert


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